Les travaux des assises nationales de la refondation qui auraient mobilisés 1.000 délégués de l’intérieur et de l’extérieur du pays se sont clôturés le jeudi 30 décembre 2021. A l’issue des échanges dans les groupes thématiques réunis au sein de 4 ateliers et des débats de plénière, diverses recommandations relatives à la gouvernance politique, économique, sociale et culturelle ont été adoptées.
Comme on pouvait s’y attendre, la prolongation de la transition a été actée. Celle-ci s’étendra entre 6 mois ou 5 ans. Cette résolution vague pour le moins irréaliste et alambiquée confirme les arguments avancés par les partis et regroupements de partis politiques du cadre de concertation (regroupement des partis de l’ancienne majorité présidentielle), soupçonnant les autorités de transitions d’utiliser comme tremplin les assises pour uniquement légitimer la prolongation de celle-ci. En effet, cette recommandation pourrait également s’expliquer par la détermination de nos compatriotes de mettre sur pied des instituions fortes, d’asseoir le jeu démocratique sur des règles claires pour en finir avec le cycle de crise politique et les séries maléfiques de coups d’Etats, traduisant un malaise profond dans la gouvernance démocratique.
En tous cas, elle accorde une large marge de manœuvre aux tenants actuels du pouvoir pour se maintenir aux affaires pendant un si bon moment. Cela, malgré les positions affichées de la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour le maintien du calendrier électoral….
En outre, la prolongation sine die de la transition peut basculer notre pays, déjà en proie à l’insécurité, au terrorisme et l’extrémisme violent vers des horizons obscurs. Elle risque d’accentuer les fractions sociales, polariser le feu partisan pour ensuite troubler le climat de paix et de stabilité sociale, pourtant nécessaire pour la réussite de la transition. Les soutiens de la junte militaire au pouvoir et ceux opposés à la prolongation de la transition pourront battre de nouveau les hauts du pavé de la mythique place de l’indépendance, devenue le symbole de la contestation. Déjà un collectif de Défense des acquis Démocratiques (CODEF AD) et la Plateforme Unie pour le Mali (PUMA) sont vent debout pour la défense des libertés individuelles et collectives qu’elles estiment allègrement violées par la transition.
Au niveau international, la prolongation de la transition risque de parachever l’isolement diplomatique de notre pays sur la scène internationale. Lequel est d’ores et déjà suspendu de l’Union Africaine, des instances de la Communauté Economiques des Etats d’Afriques de l’Ouest (CEDEAO) et celle de l’organisation internationale de la Francophonie (OIF). En plus des sanctions ciblées d’interdiction de voyage au sein de l’espace CEDEAO à l’encontre des autorités de transition et des membres de leurs familles, ce choix n’expose t- il pas notre pays si fragile à d’autres sanctions plus contraignantes ? En tous cas, semble t-il, aucune communauté internationale ne s’accommodera avec un pouvoir transitoire de 5 ans, qui a tout l’air du mandat d’un Président de la République démocratiquement élu.
Les autorités de la transition doivent savoir raison garder et s’atteler à l’essentiel c’est-à-dire l’organisation d’élection transparente et inclusive (mission essentielle d’un pouvoir transitoire) en laissant le soin au Président de la République, fort de la légitimité populaire, les réformes nécessaires à la refondation pour l’avènement du Mali Koura.
Alpha Sidiki Sangaré